Aubrac 3 - Les boraldes -
Comment évoquer en quelques lignes
l'histoire géologique mouvementée de l'Aubrac ?
Essayons.
Il nous faut remonter loin dans le passé.
De 300 millions d'années.
Jusqu'aux temps, immémoriaux, de la Pangée.
Sur cet unique continent s'est édifié une grande montagne,
dans le genre Himalaya.
C'était la chaîne hercynienne.
Pourtant cette énorme montagne va être rabotée,
entièrement détruite par l'érosion, ou presque.
Il ne va en rester que son socle de granit,
plus ou moins malmené, parfois aminci, fracturé,
recouvert d'une épaisse couche de sédiments.
Les choses auraient pu, comme on dit, en rester là,
si la fée Orogenèse n'avait pas provoqué, sciemment,
la collision de la plaque continentale africaine avec l'européenne.
Cette collision a entraîné le surgissement des Alpes,
toujours en cours.
Sous l'énorme poids de la chaîne alpine, monstrueuse surcharge,
le socle granitique hercynien s'est encore plus fracturé qu'il n'était,
et toutes les régions avoisinantes ont été déséquilibrées,
en particulier celle, toute proche, du centre de la France.
De très longues fissures méridiennes vont s'ouvrir,
s'étendant du sud au nord,
et dans ce réseau de failles le magma brûlant va monter.
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Zoomons sur cette région qui deviendra l' Aubrac.
Le magma qui monte là est rarement épais.
Quand cela se produit, il donne lieu à un volcanisme explosif.
Mais pour l'essentiel, le magma n'est pas épais
et vont donc se produire des coulées incessantes de lave fluide,
un peu comme dans l'île de la Réunion.
C'est un véritable fleuve de roche en fusion
qui va se déverser pendant plusieurs millions d'années,
une lave liquide qui va se répandre comme une boue brûlante,
comme une marée de métal en fusion.
Les coulées succèdant aux coulées,
les nouvelles recouvrant les anciennes déjà solidifiées.
Leur accumulation va créer une grande chape de basalte,
la lave devenant pierre.
Ainsi s'est formé un immense plateau : l'Aubrac.
Mais la même question se pose là encore :
l'histoire va-t-elle s'arrêter ?
Le passé se trouvant comme enterré
sous une immense et très épaisse pierre tombale ?
Bien sûr que non !
La terre ne cesse pas un instant de vivre.
Tout ce qui se fait se défait un jour.
L'érosion va entrer immédiatement en jeu.
Vous savez, cette modeste force qui, en prenant son temps,
avait abrasé jusqu'à la faire entièrement disparaître
la gigantesque chaîne hercynienne.
L'eau, si fragile, a donc entrepris de creuser la roche :
cette lave vitrifiée qui semble inaltérable tant elle est dure.
Et la puissante carapace, qui semblait invincible,
a reculé devant l'eau du ciel.
Des vallées se sont creusées.
Des torrents furieux se sont mis à détruire la roche,
à la déchiqueter,
la réduire en cailloux, en gravillons, en minuscules fragments,
et ont entraîné tout cela vers des rivières et des fleuves.
L'Aubrac est de ce fait sillonné de nombreuses vallées,
où affleurent des masses rocheuses diverses
qui nous racontent toute cette histoire
que j'ai en l'audace d'ébaucher.
Les torrents sont toujours en action :
on les appelle des "BORALDES".
Leur eau, née des pluies, continue de tarauder la roche,
de la déliter, de l'entraîner dans ses remous,
creusant toujours, provoquant des effondrements,
aménageant ainsi des vallées étroites, pentues,
parsemées de cascades...
Ainsi cette boralde, près de Nasbinals et de Saint Urcize,
la boralde de ... (help !).....
L'eau, prenant son temps, semble s'amuser à ce jeu,
chanter sa joie,
et nous révéler,
de sa voix cristalline,
tout en traversant une forêt enchantée,
toute l'histoire que je viens de vous conter.