Les grands lacs de Champagne - 2 - Les Grues Cendrées.
Les grues cendrées !
Quels magnifiques oiseaux !
Depuis plusieurs années je les voyais passer et repasser,
mais je les prenais pour des oies !
Leur nom latin est plaisant : GRUS GRUS !!!!
Il rappelle un peu leur cri, qui est souvent transcrit ainsi :
KRRROU KRRROU !!!
Ce cri, si caractéristique, emplit le ciel lors de leur migration.
Il s'entend à des distances incroyables.
Sa puissance serait due au fait que le sternum de cet oiseau est creux, que sa trachée y fait un petit détour, ce qui fait jouer à ce sternum le rôle d'une caisse de résonance.
La nature est vraiment étonnante.
Mais quand passent les grues, on entend très distinctement deux types de cris, un krou krou grave, et à côté un cri bien plus aigu.
Ces petits cris, un peu plaintifs, sont poussés par les jeunes, âgés de un an, qui suivent encore leur parents : il faut bien qu'ils apprennent le chemin du retour.
Ensuite ils seront fermement incités à quitter le couple parental,
qui est un couple stable.
J'ai peu vu les grues cendrées lors de ce voyage,
mais j'ai beaucoup appris sur elles !
Il existe dans le monde 15 espèces de grues,
mais la "cendrée" est, avec la "grue du Canada" la plus nombreuse.
Je vais préciser quelques chiffres quant à leur population
car j'avais entendu, et transmis, quelques chiffres fantaisistes
qu'il faut absolument oublier !!!!!
Où se reproduisent les grues cendrées ?
(Celles que nous voyons passer en Europe )
En Allemagne (au nord de l'AQllemagne),
en Pologne,en Sibérie,
en Scandinavie( Suède, Finlande)
dans les pays baltes.
Et ce, pendant l'été.
A l'approche de l'hiver, elles repartent vers le sud :
péninsule ibérique, Afrique du Nord.
Elles ne font donc que transiter chez nous.
Sauf quelques couples qui semblent maintenant rester...
en France, aux Pays bas, en République Tchèque.
nous en reparlerons.
On estime les effectifs mondiaux des grues cendrées
à 400.000.
En fait l'espèce avait beaucoup régressé,
mais depuis une trentaine d'années,
la population ouest européenne a été multipliée par 4,
et ce en partie grâce au lac du Der.
De tout temps les grues ont survolé la Champagne,
mais les haltes migratoires étaient diffuses et brèves,
et ne rassemblaient au mieux que quelques centaines d'oiseaux.
Depuis la création du lac du Der, la quasi totalité des oiseaux s'y arrêtent.
C'est lors de la descente en automne que les grues sont les plus nombreuses : jusqu'à 120.0000 certaines années.
La carte que voici montre qu'il existe plusieurs couloirs migratoires.
Celui qui passe en Italie conduit les oiseaux jusqu'en Tunisie puis en Algérie.
D'autres couloirs plus orientaux les emmènent en Turquie.
Celui qui traverse la France passe d'abord par la Hesse,
puis entre en France par la Lorraine,
gagne la région Champagne-Ardenne
( le lac du Der joue maintenant un rôle clé)
et enfin parvient en Aquitaine.
Ce couloir est large de 80 à 100 km.
La vitesse de leur vol varie de 40 à 70 km/H
en fonction de régime des vents.
Ils peuvent voler 30 heures sans s'arrêter.
Le vol a lieu de jour comme de nuit,
à une altitude comprise entre 200 m et 1000 m,
parfois plus bas de nuit.
Les oiseaux peuvent très bien ne pas s'arrêter en France
et gagner directement l'Espagne.
Certains descendent jusqu'au Maroc.
Mais pour le plaisir ils s'arrêtent maintenant au Der !
Ce sont des touristes intelligents qui savent jouir des beaux sites.
Ils peuvent rester là quelques jours,voire plusieurs semaines.
Ils se nourrissent du maïs qui reste dans les champs.
Ils cherchent aussi dans les herbages des vers de terre, des insectes, et des petits rongeurs.
Et si le couvert est mis, pourquoi ne pas rester ?
Il semble que de plus en plus de couples décident d'hiverner sur place.
On estime par exemple à 68.000 le nombre des grues qui sont restées en France en janvier 2001, alors que la population ouest européenne est évaluée à 160.000 individus.
La migration se fait en 2 ou parfois 3 vagues principales.
Le premier départ important se situe durant la deuxième semaine d'octobre.
La seconde vague, souvent plus importante (86.000 oiseaux en l'an 2000)
se produit 2 à 3 semaines plus tard.
Et parfois une troisième vague se produit.
Cela semble en rapport avec de brusques chutes de température,
et aussi au régime des vents,
un vent d'Est à Nord-Est favorisant un départ massif.
Si les grues ont un comportement grégaire pour effectuer leur migration,
elles deviennent très "territoriales" une fois parvenues à destination,
les couples ayant tendance à s'isoler les uns des autres lors de la nidification.
Dès la mi-janvier, la migration reprend dans l'autre sens.
Elle se fait par les mêmes couloirs.
***********************
Qu'ai-je vu lors de ces trois journées ?
D'abord pas grand chose.
Car le matin, presque toutes les grues présentes sur le lac le quittent dès le lever du soleil pour se rendre dans les champs, à la recherche des chaumes de maïs, ou dans les prairies.
Et celles qui restent se trouvent sur des bancs de sable,
ou des ilots, bien isolés à l'intérieur du lac,
donc beaucoup trop loin pour permettre une observation visuelle.
Et je ne les aurais probablement pas vues ....
si je n'avais pas rencontré des ornithologues passionnés
munis de puissantes longues vues...
Quel délice alors de les observer comme si elles étaient là toute proches !
Le soir du dernier jour, je n'ai quitté le lac que le plus tard possible,
ce qui m'a permis de les voir revenir par petits groupes, vers le lac.
Leur vol est réellement magnifique.
Plus haut dans le ciel de grands V sigalaient l'arrivée de nouvelles formations venant du Sud Ouest.
************************
Dois-je vous dire que j'ai envie de revenir en ces lieux ?
Mais ce ne sera probablement pas en mars.
Plutôt fin octobre, ou aux tout premiers jours de novembre.
Et voilà ce que j'aimerais :
me trouver là au lever du soleil,
au moment où tous les oiseaux qui ont passé la nuit sur le lac
s'envolent pour partir se nourrir.
Le spectacle, visuel et sonore, est parait-il inoubliable.
Je veux bien le croire.
*****************************