Conte de la princesse Elisa - Ce à quoi il me fait penser -
Proposer un conte est tout sauf anodin.
Celui-ci m'emmène... très loin.
Et malgré son allure naïve et... bizarre, je le rangerais volontiers dans une catégorie que je nommerais celle des contes "mystiques".
Et, je ne sais pas trop pourquoi, j'ai envie de vous proposer, pour l'illustrer, ce dessin inspiré par une des photos qu'eMmA a mis sur son blog en parlant de Lulu.
Bien sûr qu'il y a un fil rouge, invisible, mais bien réel, qui relie tous ces éléments en apparence disparates.
http://www.emmacollages.com/article-pour-lulu-54097440.html
Ne s'agit-il dans ce conte que de psychologie amoureuse ?
L'art de se faire désirer....?
Comment séduire une femme ?
Toucher son coeur....
En montrant ses extraordinaires capacités ?
Ou en faisant preuve de plus de modestie ?
Comme se choisir un homme ?
Se trouver un mari ?
Peut-être pas , pour la femme, en se montrant trop "facile" ?
Mais alors ce conte est mal foutu et mérite mille critiques !
Pour moi, tel n'est pas le niveau de ce conte.
Son inspiration est tout autre.
Son thème est celui des "noces intérieures"
abordé aussi dans le conte de "la jeune fille sans main".
Ce thème est superbement exposé dans un minuscule conte soufi,
un vrai bijou qui tient en quelques lignes :
Un homme vint frapper à la porte de l'Aimée.
Une voix à l'intérieur demanda : qui est là ?
L'homme répondit : C'est moi.
La voix dit alors :
Cette maison ne peut pas nous abriter tous les deux ensemble.
Et la porte demeura close.
Alors l'amant s'en alla dans la solitude.
Il jeûna et pria.
Un an plus tard, il revint.
Il frappa de nouveau à la même porte
mais plus doucement.
La voix demanda encore : qui est là ?
Alors l'amant répondit : c'est toi.
La porte s'ouvrit.
Oui, je sais, vous allez dire que je délire.
Mais ces quelques lignes contiennent l'idéal de tous les mystiques,
de l'Inde, du monde chrétien, de l'Islam.
Notre monde habituel, phénoménal, est celui du dualisme.
Je suis moi, et tu es toi.
De ce fait la relation amoureuse est un jeu
où deux personnes sont séparées par d'indestructibles murs.
Je te séduis, tu m'appartiens.
Relation que l'on ose imaginer heureuse
sous le prétexte qu'il y aurait réciprocité.
Je te tiens, tu me tiens, par la barbichette.
Mais en général cela ne donne que deux prisonniers,
qui cherchent l'un et l'autre à s'évader.
Tromperies mutuelles qui évidemment sont de pures illusions.
.
L'Amour, pour le mystique, ce n'est pas cela.
C'est la perte du moi.
Ce n'est plus penser : je suis Moi.
C'est penser : je suis Toi.
Est-ce possible à un niveau humain ?
On peut en douter.
Aussi le mystique va vivre cette identité avec... Dieu.
Dieu, c'est l'aimé idéal.
Dans cette perspective, Dieu n'est plus un être extérieur,
n'est plus un justicier tout puissant et redoutable
qu'il faut craindre et obéir en tremblant
comme le gosse pris sur le fait
parce qu'il a mis son doigt dans le pot de confiture.
Pauvres croyants qui tremblent encore devant leur Dieu-Père Fouettard !
Dans cette vision là,
Dieu est l'amant intérieur, au sein de mon être,
qui me cherche et que je cherche.
Il est le coeur même de mon être.
Dans le conte soufi, il est l'aimée.
Question :
Comment peut se faire la rencontre ?
Quand Elisa pourra-t-elle "épouser" l'homme ?
Quand l'homme sera capable de dire : je suis toi.
Quand il pourra penser :
Dieu est mon Père et je suis son fils,
et d'ajouter, comme Jésus :
moi et Mon Père nous sommes un.
Cette union (noces intérieures) est une réunion.
Je suis sorti du sein de Dieu : m'unir à lui, s'est le retrouver.
Retrouver mon origine.
C'est, en termes hindouistes,
l'Atman qui retourne dans le sein deBrahman,
la goutte d'eau qui retourne à l'océan.
D'où la célèbre formule des Upanishads : "Tu es cela "
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Quel rapport me direz-vous avec la vie amoureuse commune ?
Celui-ci :
le "mariage" humain, entre un homme et une femme,
est l'expérience la plus proche ce ce grand mystère ontologique.
Est-il étonnant que les couples que nous formons grincent un peu ?
L'aventure de l'amour se situe d'emblée dans ce grand projet.
Et ce dès le premier jour !
Si je te choisis, c'est que je me reconnais en toi,
que je t'ai toujours connue, toujours désiré(e),
que je te porte en moi depuis mon origine.
Illusion ?
Objectivement, oui.
Tout l'enjeu, dans un couple humain bien réel,
va être de se rapprocher le plus possible de cet idéal.
De se rapprocher de l'unité
sous les apparences de la dualité.
Qu'il se produise quelques cahots... est inévitable.
Je vais scanner la dernière page de mes notes
mais elles datent de 20 ans.
je m'aperçois que ce n'est pas lisible
je les retaperai car j'y aborde les symboles qu'utilise ce conte.
et si vous voulez je vous raconterai la chose tout à fait folle que j'ai faite avec ce conte.
Mais là , il faut que j'aille faire cuire des pâtes pour ce soir !
Avec des oeufs au plat, ça ira ?
Ma fille dit oui : alors c'est parti !