Promenades philosophiques - 5 - Le poème de Parménide "De la Nature" -
Ne tenant pas à me faire écharper
je vous livre sans plus tarder le texte du poème.
Une soixantaine de vers.
Mais j'ai une autre inquiétude.
Le texte que voici, et sur lequel je vais réfléchir avec vous,
est une traduction du texte grec.
Or ce n'est pas moi le traducteur.
Je l'ai dans mes documents écrits depuis une bonne quinzaine d'années,
époque où je n' imaginais pas publier un jour quelque chose à ce sujet.
Or je n'ai aucune indication relative à l'identité du traducteur,
et pas plus à celle de l'éditeur de cette traduction.
Par avance je présente mes excuses à l'un et à l'autre
si ils estiment que je lèse leurs droits.
Je suis prêt à me mettre en relation avec eux
et, s'ils le désirent, à retirer mon article.
Mais je dois dire que de toutes les traductions que j'ai pu lire
celle-ci emporte toute mon admiration
et que ce serait avec un immense regret que je m'en séparerais.
Je la connais presque par coeur !
De la Nature.
Les Cavales qui m'emportent
m'ont mené où mon âme me poussait.
Sur la route, entre toutes connues, du divin,
elles se sont élancées.
Sur la route qui mène à travers l'Univers l'homme qui réfléchit.
C'est par là que je fus mené,
c'est par là que les Cavales très habiles m'ont conduit.
Et elles menaient mon char,
et les Vierges m'indiquaient la route.
De chaque côté tournaient et m'entraînaient les roues,
et l'essieu dans les moyeux
chauffait
et criait comme crie une flûte ,
lorsque les Filles du Soleil , pour me guider,
ont abandonné les demeures de la Nuit,
ont écarté de leurs mains leur voile sur leur tête,
et vers la lumière
m'ont conduit.
C'est là que se trouvent les portes qui,
sur les chemins de la Nuit et du Jour, sont fermées,
avec en haut une poutre transversale,
et en bas un seuil dans la pierre façonné,
et les portes, dressées dans l'air,
sont fermées par de puissants battants.
Et la Justice, irréductible,
garde les verrous au double mouvement.
Les Vierges l'ont abordée,
avec des mots pleins d'adresse et bien doux,
et elles ont obtenu d'elle
qu'elle retirât le verrou du pêne qui maintenait la porte,
et les battants s'ouvrirent tout grands
et firent glisser les ronds
dans les écrous garnis de cuivre
et munis de chevilles et d'agrafes.
Et tout droit à travers l'ouverture,
les Vierges menèrent vite le char attelé et leurs montures.
La Divinité me regarda
et me reçut avec bienveillance,
et elle me prit ma main droite dans sa main,
et elle dit les paroles suivantes :
" Ô garçon,
qu'accompagnent les immortelles meneuses de poulains,
Ô toi qu'ont emmené jusqu'à nous et conduit les chevaux,
je te salue bien !
Car ce n'est pas un sort funeste
qui t'a fait prendre la route que tu as prise,
et qui est si éloignée des chemins frayés par les humaines entreprises,
mais c'est la Justice et le Droit,
et il faut que tout te soit révélé,
aussi bien le coeur impassible de la vérité
qui forme un cercle parfait,
que les opinions humaines,
auxquelles il ne faut ajouter aucune créance assurée.
Allons, je vais parler,
et toi, prête l'oreille à ce que tu vas entendre de moi :
Pour atteindre à la connaissance de l'Univers,
il n'y a que deux voies.
L'une affirme l'existence de l'Être,
et dit qu'il est impossible que l'Être ne soit pas.
Voilà la route de la Certitude.
C'est la méthode qui accompagne la Vérité du même pas.
L'autre affirme l'inexistence de l'Être,
l'existence du Non-Être.
Je dis que cela n'est qu'un mauvais sentier
où l'on ne peut rien connaître.
On ne peut pas saisir le Non-Être,
puisqu'il est hors de notre portée,
on ne peut pas le définir.
Tandis qu'il n'y a pas de différence
entre l'Être
et sa pensée. "